On se rapproche de la fin de notre série du jeudi qui remontait la décennie qui vient de s’écouler. Avant dernier article sur l’année 2018 avec toujours plus de dilemmes.
L’album de Play To Die : Rezn – Calm Black Water
2018 fut, comparée aux autres années, très pauvre en sorties me plaisant. Je peux juste citer, Carpenter Brut, Hangman’s Chair et Night Verses en plus de l’album concerné par cet article. 2018 est par contre l’année où j’ai véritablement commencé à aborder la scène Stoner, grâce à Rezn et son album Calm Black Water. Je suis tombé sur l’album par un hasard total, sa superbe pochette ayant attiré mon regard au détour d’un site recensant les sorties musicales. Le site redirigeait alors vers le single « Quantum Being », qui m’entraîna immédiatement vers les tourbillons du stoner / doom psychédélique.
Rezn est un groupe relativement récent, son premier album étant sorti en 2017. Le groupe est presque un power trio typique du stoner, à cela près qu’un quatrième membre s’occupe des samples psychédéliques et d’un saxophone. Sur Calm Black Water, les quatre musiciens vont étaler sur six morceaux de longueur égale (tous entre 6 et 7 minutes) des paysages sous-marins étant plus ou moins accueillants selon le morceau. Les passages lourds à souhaits alternent avec des parties calmes où vous vous retrouverez la tête sous l’eau en train de nager avec la créature de la pochette. Calm Black Water est fluide, les morceaux s’enchaînant sans coupure hormis entre « Quantum Being » et « High Tide », la face A du vinyle s’arrêtant justement entre ces deux morceaux. En résulte une homogénéité qui fait qu’on n’est jamais perdu, même en explorant ce vaste océan de doom.
Chaque chanson est centrée autour du thème de l’eau, chacune ayant ses forces. « Mirrored Image » flotte au milieu de ses parties de saxophone hypnotisant sans jamais décoller, nous permettant de s’immerger pleinement dedans. « Quantum Being » quant à elle navigue entre un riff principal à vous décrocher les cervicales et une partie calme psychédélique perdue dans des eaux saumâtres. Jusqu’à ce qu’un build-up court mais à l’efficacité impressionnante vous en extirpe pour que puissiez prendre en pleine face les ondes de fuzz distordu sans que l’eau dans vos oreilles l’atténue. Pour finir l’album « Sunken », vous coule au fond des abysses, attrapé par un monstre subaquatique de doom devenant de plus en plus difforme à mesure que vous vous enfoncez dans les profondeurs d’un océan glacial.
Calm Black Water fut une surprise. Rezn aussi. Le petit groupe de Chicago sort un excellent second album (après Let It Burn) ayant tous ses aspects (composition, son, paroles) travaillés pour en faire une perle du genre. Je n’attends désormais que son successeur (tant ce groupe et cet album m’ont marqué ces deux dernières années. Enfilez votre combinaison de plongée et allez explorer Calm Black Water, vous ne le regretterez pas.
L’album de Maxallica : When Reasons Collapse – Omen of the Banshee
Cocorico pour 2018 ! Et oui mon album de l’année est français et l’oeuvre des copains de When Reasons Collapse avec leur deuxième opus, Omen of the Banshee. Le choix ne fut pas facile et j’aurai aisément pu voter pour Parkway Drive et son Reverence, Architects avec Holy Hell, Turnstile et son Time & Space, ma grosse découverte de Conjurer avec Mire ou le majestueux Avatar Country de Avatar.
Mais voilà les compères franciliens ont sortit un immense album avec Omen of the Banshee, digne successeur de l’incroyable Dark Passengers. Naviguant entre deathcore et metalcore, When Reasons Collapse a pris le meilleur des deux styles pour nous en offrir une version à sa sauce qui ne ressemble à rien d’autre. Tout est personnifié, tout fait sens et le bulldozer te roule dessus pendant les neuf titres que composent cet opus. Entre le premier morceau entièrement instrumental, « Escape », puis l’arrivée tonitruante de Cristina (chant) sur « Lies of God » jusqu’aux derniers instants de l’émouvant « Lost », c’est une avalanche de riffs que nous offre le duo Thierry – Julien.
Rarement du modern metal n’aura été aussi bien sous toutes les coutures, enregistré et produit par le groupe lui-même cet album n’est pas tout aseptisé et ça fait plaisir dans le monde du metal extrême. On entend chaque instrument, on se prend les blasts beats de Guillaume en pleine poire pendant que Michael nous sort tranquillement des parties de tapping sur sa basse.
Très honnêtement ça me rend malade quand je vois que cet album compte moins de 1000 écoutes sur Spotify car je suis persuadé que si le combo était anglais, australien ou américain ils auraient une reconnaissance et une notoriété bien plus élevé. Alors je vous conjure d’aller écouter Omen of the Banshee, vous viendrez me remercier par la suite promis.
L’album de Drey Talquor : Hangman’s Chair – Banlieue Triste
2018 en termes de sorties musicales fut une année assez… bizarre disons. Beaucoup d’albums ont marqué mon esprit, mais fut moins abondante que d’autres. Clairement l’avant dernière année de la décennie ne fut pas la plus marquante. Et pourtant, quelques claques ont réussi à se frayer un chemin dans mon top de ces dix dernières années.
Parmi ces claques, deux retiennent mon attention. A savoir Pharenozoïc I : Paleozoïc de The Ocean, dont on parlera sans doute un autre jour car aujourd’hui, intéressons nous à un groupe Parisien. Ayant sorti un immense album de doom froid et crasseux en cette année 2018. A savoir Hangman’s Chair et leur disque Banlieue Triste
Hangman’s Chair de base n’est pas un groupe des plus joyeux, rien qu’au titre de leurs précédentes sorties à savoir This Is Not Supposed To Be Positive en 2015 et Hope///Dope///Rope en 2013, le décors est d’avance posé. On a affaire ici à un mélange de rock et de doom sale, qui sent le tabac froid, nous racontant l’inhumanité que dégage la métropole Parisienne. La musique du groupe s’est toujours ancrée dans ces dédales de bétons inaccueillants, nous remettant à notre place, simple fourmi perdue dans la jungle.
Dans la continuité de cette narration sort Banlieue Triste, qui vient rajouter un clou dans le cercueil qu’est la musique d’Hangman’s Chair. On a affaire ici à une nouvelle prouesse. C’est un disque sombre et… triste justement. Jamais un album n’auras aussi bien porté son nom que celui-ci. Dés l’ouverture sur la petite introduction éponyme, vient la déferlante « Naïve », qui confirme encore une fois la place d’Hangman’s Chair comme patrons du doom français. Ils arrivent par la suite à nous capter l’attention pendant 11minutes avec un simple arpège de 3 notes sur « Touch The Razor » pour revenir aux bases d’un double morceau, une intro mélancolique et mystérieuse avec « Tara » puis une piste coup de poing sur « 04.09.16 » (dont la date cachée derrière ce morceau correspond à la nuit ou un ami du groupe aurait fait une overdose). La suite de l’album n’est pas en reste, avec la lancinante collaboration avec Perturbator sur « Tired Eyes » et la magnifiquement triste « Negative Male Child » qui en vient prévenir l’auditeur de la fin en apothéose qui arrive et qui va l’achever avec la dernière piste « Full Ashtray ».
Le groupe à ici sorti pour moi son meilleur disque, qui m’a beaucoup accompagné pendant des moments pas joyeux de mon année 2018 et qui a marché du tonnerre sur moi. Le son si particulier d’Hangman’s Chair en fait un groupe à suivre absolument. N’étant pourtant pas de la capitale, les textures sonores développées ici se dessinent parfaitement dans mon esprit. Pour cet album, nous nous voyons dans un paysage froid et pluvieux, assis sur un banc délabré en train de boire une bière de mauvaise qualité avec le bruit des bouchons sur le périphérique en fond sonore. La force de ce disque est d’avoir parfaitement décrit l’atmosphère pesante que ressent quotidiennement les membres du groupe et les Franciliens habitant dans les mêmes immeubles oubliés de tous à côté des friches industrielles.
Mais attention, je vous conseille son écoute seulement lorsque vous n’allez pas au meilleur de votre forme, celui-ci ayant un gros effet cathartique. Banlieue Triste fait parti de ces rares disques dont cet effet a totalement agi sur ma personne, que j’ai beaucoup écouté durant les saisons froides de l’année en rentrant de soirée perdu dans la nuit inanimée de ma ville. En soit l’ambiance parfaite pour écouter cet album qui occupe une place très haute dans mon classement de la décennie.
L’album de Tolol : Graveyard – Peace
Pour ne rien vous cacher, il était prévu que je vous parle de Calm Black Water de Rezn, mais quand j’ai su que ce bon Play To Die l’avait choisi comme album de 2018, je me suis rabattu sur le disque partageant la 1e place du podium dans mon coeur pour cette année.
J’aurai également pu vous parler de Pharenozoic I de The Ocean, du diptyque Automata de BTBAM ou bien encore de Lucifer II de Lucifer, mais c’est bien le quatuor de Göteborg qui remporte le débat. Il faut dire que leur musique ne me laisse jamais indifférent.
Graveyard est un groupe qui a brisé les cœurs de ses fans en 2016 lors de l’annonce de sa séparation. En 4 albums, les Suédois s’étaient imposés comme une référence du Hard Blues avec autant de pépites rock n’roll qu’il n’y a de titres sur leurs disques. Et puis après un an de pause et un changement de batteur, Graveyard sort de sa tombe et annonce un successeur à Innocence & Decadence. Joie et allégresse dans les foyers des stonerheads du monde entier.
En mai 2018, Peace débarque et rassure tout le monde. Oui Graveyard est en pleine forme et est encore capable de balancer des tueries par paquets de 100. A commencer par le premier single « Please Don’t ». C’est tout droit, c’est d’une efficacité redoutable et ça fait headbanger comme jaja. Mais l’autre immense qualité des Suédois réside en leur ballades. Et cet album en contient une magnifique : « Low (I Wouldn’t Mind) ».
Histoire de rajouter une couche de compliments, le quatuor est excellent lorsqu’il s’agit de jouer en live. Leur performance au Hellfest 2019 reste comme une des meilleures de cette édition. Graveyard est une valeur sure du Rock avec un grand R. Cet album l’a confirmé et maintenant on attend la prochaine galette pour kiffer d’autant plus sur la voix de Joakim Nilsson.
L’album de MattRouq : Architects – Holy Hell
Non. Alors là, vraiment, c’est non. J’ai remonté la liste, la longue liste des albums que j’ai écouté en 2018. J’ai recensé 21 ALBUMS. 21 qui, à défaut d’être des albums de l’année de la tête et des épaules, mériteraient au moins une citation. Mais le problème, c’est que ça prend beaucoup de place, alors tant pis. On va se concentrer sur celui qui a le plus retenu mon attention.
Mais comme j’aime la contradiction, je vais tout de même me permettre de citer Beerbongs & Bentleys de Post Malone, Only Rocks Live Forever de The Zealots, Beautiful Death de Slaves… Et puis ceux qui viennent compléter un top 4 qui serait sans doute différent si j’écrivais ce paragraphe demain : Dispose de The Plot in You, Disease de Beartooth et Hard Feelings de Blessthefall.
Il a fallu choisir. J’ai mis très longtemps à choisir. Mais finalement j’ai décidé de nommer Architects comme album de l’année. Holy Hell est un concentré de rage, de peine et on sent que c’est un véritable exutoire pour Sam Carter. Rarement des cris ne m’auront autant pris aux tripes. Rarement un album ne m’a donné autant envie de tout casser seul dans ma chambre, comme si j’étais au milieu du pit. De « Death is not Defeat » à « A Wasted Hymn », la production ultra-léchée de l’album fait de lui une immense réussite sur toute la ligne.
Alors certes, on pourrait dire que le groupe suit à la lettre la recette de All Our Gods Have Abandonned Us, et ce ne serait pas entièrement faux. Mais quand ladite recette est à ce point un régal, et que les anglais parviennent à en tirer la quintessence, pas trop de raisons de changer. Allez, vous reprendrez bien un peu de « BLEGH » dans votre breakdown ?