2021 est la dix-septième année de carrière d’Architects, une carrière productive puisque For Those That Wish To Exist est déjà le neuvième album du combo de Brighton. Et pourtant ce n’est pas un album comme les autres puisque cet opus est le premier sans aucune partie ayant été écrite par feu Tom Searle.
Je crois honnêtement qu’il est difficile de chroniquer un album d’Architects et c’est d’autant plus compliqué sur For Those That Wish To Exist que ce dernier va fortement diviser. Ceux criant au génie auront raison sur certains points : le groupe proposant un mix agréable entre nouveaux éléments et parties plus classique. Le reste clamera sa déception à tort et à travers et il sera difficile de leur en vouloir tant cet album manque d’une véritable vision globale, en plus de compter une ou deux pistes bien dispensable. Comme vous l’aurez compris dans ces premières lignes, For Those That Wish Exist n’est certainement pas le meilleur album de la carrière du groupe mais comment leur en vouloir en même temps ? On a déjà vu le groupe se vautrer une première fois à la sortie de The Here And Now en 2011 puis rebondir à merveille. Rassurez-vous la dégringolade n’est pas aussi catastrophique, loin de là même, mais elle fait se poser des petites questions sur le futur d’Architects.
Comme pour Holy Hell, Architects a décidé pour sa nouvelle offrande de travailler en vase clos avec Dan Searle (batterie) et Josh Middleton (guitare) à la production. L’empreinte du batteur est comme d’habitude partout puisqu’en plus de la production, il est le principal compositeur en plus d’être le seul parolier. Rien à redire sur la production, c’est aussi propre que possible dans tous les cas de figure.
« Animals » était un choix intelligent pour le premier single de l’album tant ce titre arrive à être un bon compromis entre le passé et le futur du groupe, en plus d’être un vrai bon morceau. « Black Lungs » puis « Dead Butterflies » sont eux aussi des bons exemples de la richesse de ce For Those That Wish To Exist, le premier grâce à son refrain en chant clair qui reste en tête et son breakdown simple mais efficace et le second car c’est sans doute le plus beau titre de l’album. En revanche concernant « Meteor » je reste plus mitigé tant il est à mettre dans la catégorie « sympa mais dispensable » avec quelques autres morceaux.
Nous en avions eu un aperçu lors du concert au Royal Albert Hall et cela se confirme à l’écoute de l’album, « Discourse Is Dead » est une véritable pépite qui ramène par moment à l’époque Daybreaker sur les riffs et la violence générale, le tout agrémenté d’éléments symphoniques sur le refrain chanté par Sam Carter (chant). Sans aucun doute mon petit préféré de cet album.
Après deux albums sans invités, le dernier en date étant Murray McLeod de The XCerts pour « Youth Is Wasted On The Young » sur Lost Forever / Lost Together, Architects frappe fort avec pas moins de trois apparitions pour trois réussites. Ces trois titres font mouche du premier coup en mettant en avant à merveille le chanteur invité et en font des moments phares de l’album. Winston McCall (Parkway Drive) qui vient poser un couplet d’une méchanceté à couper le souffle sur « Impermanence » pour le titre le plus violent de l’album avant que Mike Kerr (Royal Blood) vienne apporter une vibe popisante sur la très réussie « Little Wonder ». Et enfin comment ne pas citer l’incroyable performance de Simon Neil (Biffy Clyro) sur « Goliath » qui vient hurler ses tripes sur la double pédale bien sentie de Dan Searle. Les apparitions de Winston McCall et Simon Neil nous offrent deux titres très largement au dessus de la moyenne et qui donnent tout son relief à cet opus.
For Those That Wish to Exist sait aussi nous offrir des moments mémorables sans avoir recourt à un invité, Architects reste une machine à tube et à riffs. Lors d’un épisode de The Downbeat, Craig Reynolds (Stray From The Path) disait que Josh Middleton était capable de se mettre dans la peau de n’importe quel groupe et d’écrire de la même manière que les musiciens en moins d’une heure. C’était flagrant sur Holy Hell et c’est encore le cas ici. Le musicien est un guitariste hors-pair et un compositeur de génie capable de nous sortir des moments qui restent en tête notamment le riff principal de « Giving Blood », le tapping de « An Ordinary Extinction » ou encore l’intro de « Goliath ».
Une chronique d’Architects qui n’a toujours pas parlé de Sam Carter (chant) ça fait sans doute un peu tâche mais il y a déjà tellement de choses à dire sur cet opus avant de s’attaquer à la prestation du frontman. Techniquement il n’y a absolument rien à redire tant Sam Carter est capable de jouer sur les tableaux du scream et du chant clair sans aucun soucis. Son scream me donnera toujours autant de frissons et c’est le cas sur « Discourse Is Dead » et « Little Wonder », et son chant clair n’est pas le plus remarquable du style mais il est capable d’être saisissant par moment, on pensera à « Dead Butterflies » et le final de « Dying Is Absolutely Safe ». Globalement ce qui pêche sur cet album vient du fait que certaines lignes de chants sont assez insipides et manquent clairement de cachet. Difficile de savoir si cela est imputable au chanteur ou à la direction voulue par le groupe dans son ensemble. Je pencherai plus pour la deuxième option et c’est le principal reproche que j’ai à faire sur cet opus.
En plus de parties de chants qui manque parfois d’âme cet album traîne un peu trop en longueur avec quelques titres dispensables comme « Flight Without Feathers », « Libertine » ou « Demi God » qui sont sympathiques mais ne marqueront pas la carrière du groupe loin de là. Sans ceux-ci le disque aurait été plus compact, plus digeste et moins long tout simplement. L’intention d’Architects de s’ouvrir à de nouveaux horizons est louable et on ne peut plus compréhensible. Je suis le premier à avouer que le groupe avait atteint la fin d’un cycle musical et émotionnel avec Holy Hell et que cette nouvelle ère fait du bien. Cependant on sent que le groupe n’a pas encore trouvé la recette imparable et qu’ils ne sont jamais aussi efficace que quand les racines font leurs apparitions.
La fin de l’album est d’ailleurs sauvé de la noyade par la pureté et la douceur de « Dying Is Absolutely Safe », un titre émouvant au possible qui nous redonne une vague de plaisir appréciable après quelques moments sans grand intérêt.
For Those That Wish To Exist est une étape essentielle à la renaissance d’Architects qui était arrivé au bout d’un cycle après Holy Hell et je pense que Tom Searle serait très fier de son jumeau et de ses frères d’armes. Cet album n’est pas parfait avec des longueurs et des titres anecdotiques mais il regorge aussi de moments violents, doux et magiques. En un mot il est attachant. Si une petite partie de moi ressent une pointe de déception devant cet album, le reste est très heureux d’avoir de la nouveauté à se mettre sous les oreilles et surtout de voir la famille Architects se relever et avancer vers de nouveaux horizons. Et si vous ne deviez retenir qu’une seule chose de cette chronique c’est qu’Architects est bien vivant, prêt à continuer sa carrière contre vents et marées. Gone with the wind but forever in our hearts.