Code Orange fait partie des groupes qui, malgré la pandémie subie cette année, ont été très actifs. Leur dernier album : Underneath, sorti durant les premiers mois de 2020 a été un franc succès. Cette réussite fût récompensée par une nomination aux Grammy Awards pour la meilleure prestation metal. Le quintette originaire de Pennsylvanie a décidé, devant l’impossibilité de se produire sur scène de trouver une alternative. De cette initiative est né Under The Skin.
Il est très surprenant de voir un collectif tel que Code Orange s’atteler à la réalisation d’un live acoustique. Ce dernier est très réputé pour l’agressivité et l’intensité de sa musique, accompagnée de prestations scéniques survoltées et puissantes. Vous l’avez donc compris, cette production constitue en elle-même un contraste intéressant. Cependant, l’effet d’étonnement se dissipe assez rapidement. Connaissant l’âge de ces artistes et surtout la génération de laquelle ils sont issus, il n’est au final pas si stupéfiant que ça de les voir dans une telle entreprise. Eux qui ont grandis avec les fameuses performances unplugged de l’époque de l’âge d’or de MTV. Un petit clin d’œil est d’ailleurs adressé à la chaîne de télé avec la mention de « Mud TV », qui en plus de lui faire référence, renvoie également à un morceau de Forever.
Le groupe a alors décidé au début de l’été de cette même année à l’occasion d’un live Twitch, d’organiser un live acoustique retraçant différents passages de sa jeune discographie. Constituant même l’occasion de reprendre un morceau d’Alice in Chains à savoir «Down In A Hole», mais remise dans notre contexte pandémique actuel. Cette réinterprétation compose une certaine manière de boucler la boucle, le quatuor de Seattle étant une des figures majeures de la popularisation de cette pratique. Cependant la comparaison s’arrête là tant cette prestation est différente et particulière. A travers Under the Skin, Code Orange parvient à nous faire redécouvrir sa musique avec brio. Le chant hurlé et saturé disparaît, laissant place à une cantate plus douce voire susurrée par moments.
La prestation de trois quarts d’heure peut s’avérer très surprenante en découvrant le travail d’adaptation très réussi, saisissant et frais entrepris par le collectif. Mais malgré l’appellation «acoustique», le groupe n’hésite pas à l’instar de ses prédécesseurs, à savoir Nirvana, à réactiver la distorsion quelques courts instants. Cette démarche peut paraître osée, mais cette dernière permet de ne pas trop décrocher de l’univers de Code Orange. La musique du quintette pennsylvanien se retrouve ici orchestrée. Durant tout le live on peut retrouver des parties de violon venant apporter énormément de nuance et de corps aux morceaux interprétés. Elles permettent également d’ajouter une certaine douceur et mélancolie aux titres exécutés.
Malgré la présence d’une grosse partie des facteurs ayant contribués à la réputation du groupe, cette nouvelle pièce peut ne pas plaire aux fans de la formation. Le ton change du tout au tout. Ici, quid de la violence et de la brutalité. A travers Under the Skin, Code Orange nous offre une réinterprétation bien plus douce et posée de son œuvre. Même la prestation scénique n’a rien à voir avec ce dont on nous a habitués. L’ambiance est bien plus mesurée, tous les membres étant assis et très calmes durant tout le live. L’atmosphère est presque planante par moment, comble des choses lorsque l’on connaît les morceaux originaux présentés, musicalement bien plus apaisé et intimiste dans sa forme. Cela paraît assez évident, mais cette performance est bien différente de ce que le quintette a placé comme étant sa norme.
L’énergie dégagée n’est pas la même. Dans cette captation, Code Orange explore un monde au sein duquel il nous expose à une toute autre vision de sa musique et de son identité. Le groupe nous montre grâce à Under the Skin une capacité d’adaptation très impressionnante d’accommodation. Des bribes de guitares acoustiques avaient déjà fait leur apparition durant la carrière du quintette, mais de manière plus brève. Notamment dans le single «Sulfur Surrounding» repris dans cette nouvelle pièce. Au sein de ce dernier opus, cette facette est poussée à son paroxysme. On peut remarquer une omniprésence et un impact mélodique plus important de la part de Reba Meyers.
Elle est déjà l’un des visages les plus vus dans le paysage médiatique du groupe, l’un de ceux très représentés et loués. Mais au sein de ce live, sa présence prend une toute autre dimension. Ses lignes de chant se font bien plus entendre que sur les pistes studios. Son influence vocale est bien plus importante sans pour autant éclipser celle du vocaliste principal Jami Morgan. Ce dernier ayant abandonné le poste de batteur lorsqu’il s’agit de monter sur scène, laissant sa place à Ethan Young. La manœuvre n’est pas habituelle, mais on sent que la démarche de Code Orange est naturelle, sincère et non forcée.
Under the Skin constitue avant tout un hommage. Ce dernier se lie évidemment à la mode des lives acoustiques popularisés durant les années 90’s par MTV. Cette œuvre ressemble en tout point à ces séries de concerts, tant au niveau musical qu’au niveau esthétique avec une scène très intimiste et ornée de bougies. Plongées dans la pénombre, présentant une ambiance calme et éthérée. Il célèbre aussi les groupes qui constituent les influences majeures du collectif à l’instar d’Alice in Chains, mis à l’honneur sur ce disque. Code Orange prouve à travers ce nouvel album tous les espoirs fondés en lui. Le quintette montre qu’il est possible de passer du statut d’inconnu à tête d’affiche en très peu de temps, tout en tentant de faire avancer le décor musical dans lequel il officie. En permettant à son art d’être renouvelé, et redécouvert.
Ce dernier fait partie des noms très prometteurs du vaste monde du metal, et il semble confirmer tout le potentiel qu’on lui attribue depuis maintenant plusieurs années.