La Pologne est une terre riche quand il s’agit d’évoquer le Stoner. Et si on a déjà évoqué quelques noms dans un podcast bien connu, il est temps de s’arrêter sur un quatuor qui ne s’arrête pas de grandir.
Dès qu’une scène musicale prend de l’ampleur, il devient difficile d’en devenir une des têtes d’affiche tant les groupes sont nombreux. Soit on parvient à sortir un album marquant, soit on trouve sa patte sonore assez rapidement, soit on se fait remarquer par une présence scénique au-dessus du lot. Si par chance, vous cumulez les trois, une belle carrière peut vous attendre. C’est typiquement le cas de Dopelord.
En une simple décennie, les Polonais ont marqué de leur empreinte la scène Stoner. Chaque album a montré l’assurance et la maturité du groupe, nous permettant d’arriver en 2020 avec une quatrième livrée qui était forcément attendue. Par chance, les festivaliers du Desertfest Anvers 2019 ont pu découvrir un titre en avance. « Hail Satan » fut jouée pour la première fois au Trix d’Antwerp, au plus grand bonheur des stonerheads tout heureux d’hurler « Hail Satan » en chœur avec Piotr Zin.
Il serait facile de créer un lien entre Dopelord & Monolord du fait de la presque ressemblance nominale. Néanmoins, si les deux entités partagent un amour certain du fuzz, du gras et du doom, on note une vraie différence dans l’approche musicale. Si les Suédois penchent du coté mélancolique du doom, les Polonais eux vont puiser leur force dans un mélange issu de la sainte Triforce : stoner, doom, sludge.
Pour s’en apercevoir, il suffit de lancer « Doom Bastards ». Une chanson dont le titre est représentatif du quatuor. Pour rappel, on dit d’un animal qu’il est un bâtard quand il n’est pas issu d’une race pure. Sous-entendu, via des croisements plus ou moins heureux qui forment une nouvelle race hybride. Une description parfaite de ce morceau. On attaque sur un doom lancinant avant que la foudre gronde. Passé le premier tiers, on arrive sur un stoner/doom d’une efficacité redoutable. Une des forces de Dopelord est son riffing, toujours excellent. Le dernier tiers s’accélère de nouveau pour laisser place à un stoner/sludge bien crasseux porté par la voix rauque de Pawel Mioduchowski.
En 10 minutes, le quatuor a réussi le tour de force de réaliser une piste pouvant servir de parfaite description de leur musique. Le tout étant d’une qualité remarquable. Cette dernière affirmation étant réutilisable pour (presque) tous les titres de ce Sign Of The Devil.
Il faut aussi s’arrêter sur les deux morceaux qui ouvrent le disque. En premier lieu, « The Witching Hour Bell ». D’entrée de jeu, on est frappé par la lourdeur de la basse et ce riff qui force ta nuque à se balancer. Le refrain transpire l’efficacité. Il en devient même sublime quand une cloche se rajoute au tapis sonore à la toute fin. Un début complètement réussi qui s’enchaîne avec « Hail Satan » cité plus haut et qui est sûrement le vainqueur de la catégorie « Refrain qu’on va hurler à pleins poumons avec ses collègues ». Et si vous ne vous étiez pas mouillé la nuque avec la première piste, « Hail Satan » va finir de vous écraser de sa lourdeur.
Il réside pourtant un défaut sur cet album qui est « Headless Decapitator ». Alors qu’on venait de passer 34 minutes dans un brouillard épais et une ambiance poisseuse, Dopelord décide de pousser les potards à fond et de rendre hommage à Motorhead mais avec un esprit un peu plus punk. Et je trouve ça dommage de casser un tel album avec un titre qui ne colle pas avec ce qu’ont créé les quatre Polonais sur le reste du disque.
Pour autant, difficile de jeter la pierre au quatuor. « Headless Decapitator » fera baisser un brin le classement final de Sign Of The Devil dans mon top de fin d’année, mais je crois que c’est plus que dérisoire. Dopelord n’est plus une valeur montante. C’est une valeur sure de la scène Stoner au sens large du terme. Reste plus qu’à espérer une amélioration de la situation sanitaire pour pouvoir revoir les Polonais sur scène. Le satanisme, c’est quand même toujours plus sympa à plusieurs.